École alternative Élan

Classe de 3e cycle

Isabelle Silverman - Titulaire


Crédit photo Sophie Richard
Crédit photo Sophie Richard

C’est à l’école alternative Élan dans le Plateau Mont-Royal que j’ai eu la chance de faire mon troisième stage dans la classe d’Isabelle Silverman. J’y ai rencontré 21 élèves de 5e et 6e année fort allumés ayant presque tous fait l’ensemble de leur parcours primaire à cette école alternative mettant de l’avant la pédagogie Freinet.

 

Comme ce stage se déroulait à l’automne, nous avions la possibilité de faire le projet « vivre la rentrée » et ainsi accompagner notre enseignante associée durant les journées pédagogiques avant la rentrée et vivre les deux premiers jours de classe avec les élèves. Quelle superbe opportunité! Pouvoir observer comment se vivent ses quelques jours avant l’arrivée des élèves fut une expérience géniale. Tout le travail à faire en si peu de temps est impressionnant : remettre la classe en place, planifier les activités de la rentrée, renouer avec les collègues, assister aux différentes rencontres de début d’année, etc. J’ai pu y observer toute sorte de façon de vivre ce retour au travail. Ceux ayant déjà pensé à tout dont la classe est prête dès le premier midi, ceux prenant plus de temps pour s’y mettre, ceux s’enfermant pour travailler, ceux jasant avant de travailler... Dès ces premiers jours, j’ai été accueillie chaleureusement et j’ai été en mesure de m’intégrer à l’équipe-école de façon assez naturelle.

 

Crédit photo Sophie Richard
Crédit photo Sophie Richard

Le thème de la rentrée était « Les espions ». Nous avons donc préparé un dossier « Top Secret » pour chaque élève avec différentes missions à accomplir durant les premiers jours de classe, dont un interrogatoire en règle avec la future stagiaire (moi) souffrant d’un mal particulier ne lui permettant de ne répondre que par oui ou par non aux questions qu’on lui pose. Ce fut émouvant de voir tous les élèves et leurs parents dans la cour d’école se retrouver, trouver leur classe et leurs camarades. Les premières journées furent marquées par les présentations, l’identification des casiers, chaises et rangements, différentes activités pour apprendre à se connaître et à travailler en équipe. La table était mise!

 

Puisque j’avais déjà rencontré les élèves dès leurs premiers jours de classe, les périodes de préstages furent facilitées. Je me demandais bien comment je trouverais ma place en milieu alternatif ayant un parcours académique on ne peut plus traditionnel… Toutefois, j’ai été charmée par la place qui est donnée à la pédagogie, celle de Freinet, au sein de cette école.

 

Crédit photo Sophie Richard
Crédit photo Sophie Richard

Que ce soit lors de mes autres stages ou en suppléance , je n’ai jamais autant entendu parler de pédagogie au quotidien. Les enseignants se questionnaient et discutaient beaucoup quant à la meilleure façon d’appliquer la pédagogie Freinet. Plusieurs outils chers à Freinet sont mis en place à Élan : conseil de classe, écriture libre, publication de textes d’élèves, plans de travail, animaux en classe, etc. On pouvait sentir toute l’implication de l’équipe-école et la volonté partagée de mettre de l’avant la pédagogie Freinet dans le but d’avoir des élèves les plus épanouis que possible.

 

Les élèves étaient forts épanouis, très allumés et fort éloquents. Ils sont articulés et ont une opinion sur tout. Bien qu’excellent pour exprimer leurs opinions, les élèves avaient un peu plus de difficulté à écouter les opinions des autres. Comme la gestion de classe était un défi pour moi lors de mon stage précédent, j’ai mis en place un système de motivation inspiré des réseaux sociaux pour favoriser les bons comportements et les célébrer. J’en ai profité pour faire une capsule d’information sur les réseaux sociaux et leur utilisation responsable. Les élèves étaient eux aussi invités à souligner les bons coups de leurs pairs. J’appréhendais un système de motivation avec des élèves du troisième cycle, mais ce fut un succès!

 

Pour ce stage, nous devions planifier, piloter et évaluer deux SAÉ différentes. J’ai en plus fait un projet de philosophie avec les élèves en travaillant les thèmes abordés dans le livre Moi et mon contraire – Le livre de tous les caractères, d’Oscar Brenifier. La première SAÉ travaillée en classe, Picasso, combinait les mathématiques et l’art. J’ai donné les instructions générales aux élèves et je les ai ensuite mis au travail sans leur enseigner la théorie reliée au travail demandé, soit créer un portrait d’inspiration cubiste contenant un ensemble de formes géométriques prédéterminées. Les élèves ont fait des recherches pour tenter de trouver les réponses à leurs questions pour pouvoir cheminer à travers la SAÉ et les différentes activités intégratrices associées. Lorsque nécessaire, j’ai fait des activités en petits groupes pour les aider à découvrir la théorie. Je me suis entre autres inspirée de Van de Walle pour faire découvrir aux élèves les caractéristiques des triangles. Il y avait, en parallèle, tout l’aspect des arts avec l’histoire de Picasso et une attention particulière sur sa période cubiste. Certains élèves se sont découvert un talent artistique insoupçonné!

 

La seconde SAÉ pilotée durant ce stage, la Publicité, s’intégrait dans le programme d’éthique et culture religieuse et travaillait beaucoup les compétences transversales. Après plusieurs activités leur permettant de découvrir la place de la publicité dans leurs vies, les types de publicités, la différence entre un besoin ou un désir, les pièges de la publicité (racisme, sexisme, hypersexualisation), les élèves étaient invités à créer leur propre publicité pour promouvoir un produit (réel ou non) ou pour faire changer un comportement. Encore une fois, c’est beaucoup par la découverte que les élèves ont eu accès aux apprentissages reliés à cette SAÉ. Les élèves ont été en mesure de créer des publicités qui mettaient de l’avant les techniques vues en classe.

 

L’évaluation de ces deux SAÉ a été grandement facilitée par les différentes grilles d’appréciation montées à partir d’échelles descriptives ou  dichotomiques selon le cas que j’avais construites lors de la planification. J’ai été en mesure de voir combien la planification de l’évaluation est essentielle et utile. En réfléchissant à ce que l’on veut évaluer et comment nous allons l’évaluer avant d’avoir les travaux en main, presque tout le travail est fait. Il reste toujours des cas où l’on doit se questionner un peu plus pour bien évaluer la compréhension de l’élève et le travail accompli. Durant mon stage, il y a eu beaucoup de rencontres concernant l’évaluation et le bulletin. Plusieurs enseignants remettant en cause le bulletin dans son ensemble ou même toute forme d’évaluation chiffrée. Cette école a obtenu une dérogation et offre un bulletin personnalisé avec une échelle et non avec des résultats chiffrés. De plus, les élèves font leur propre auto-évaluation et l’on met beaucoup l’accent sur les commentaires tant des élèves que de l’enseignant. J’ai bien aimé cette version plus « humaine » du bulletin, mais j’ai aussi parfois trouvé difficile de justifier certains résultats mis aux bulletins puisqu’il y avait peu de traces tangibles pour les appuyer. Ma réflexion sur l’évaluation ne fait que commencer et elle se poursuivra au prochain stage et certainement encore longtemps.

 

Finalement, j’ai eu la chance de participer aux rencontres de remise des bulletins où j’ai pu constater toute la douceur, l’expérience et la passion de mon enseignante associée. Tous les parents ont reçu une image positive de leur enfant, même ceux ayant de bonnes difficultés académiques ou comportementales. Le lien qui unit l’enseignante, les parents et les élèves dans ce milieu est particulier. L’école est ouverte aux parents, à la communauté. Comme dit le proverbe : il faut un village pour élever un enfant. Il n’était pas rare d’avoir un parent arriver directement en classe pour venir porter un lunch oublié ou pour venir donner un coup de main pour repeindre les casiers. J’ai adoré cette ouverture, cette communauté. Je ne sais pas encore si j’aimerais faire carrière en milieu alternatif, mais il est certain que je m’en inspirerai, peu importe où j’enseignerai.